Pioneer et BASF proposent de nouvelles variétés de tournesols dont la particularité est d’être tolérants à un herbicide.

Leurs promoteurs prétendent qu’il ne s’agit pas d’OGM.

La directive européenne qui réglemente les OGM les exclut de son champ d’application.

Qu’en est-il exactement ?


Tournesols mutés – Action Bollène

Dossier de presse Bollène

Compte-rendu, photos et vidéo

Tournesols mutés : arguments et contre-arguments

Communiqué de presse du Collectif des Faucheurs Volontaires après l’action de Montech

Tournesols mutés : compléments sur les herbicides

Rencontre Faucheurs Volontaires/Ministère de l’Ecologie

OGM_j_en_veux_pas-5.jpg
semeur_moyen-7.jpg

Le point de vue technique

Pioneer a mis au point la lignée de tournesol SU7 avec caractère ExpressSunmc qui a la particularité d’être tolérant à un herbicide. Le tournesol a été rendu tolérant à l’herbicide par l’exposition à une substance mutagène chimique qui a produit une modification génétique d’un gène bien spécifique (voir : Lignée de tournesol SU7 avec caractère ExpressSun et tolérant les herbicides et
Les tournesols résistants à des herbicides se font prier. Voir aussi “Pespectives agricoles” n° 353 de février 2009)

Sur le plan fonctionnel il s’agit donc d’un Organisme Génétiquement Modifié (par mutagénèse) pesticide comme l’est par exemple le soja Roundup Ready de Monsanto tolérant au glyphosate.

Par contre le procédé de production est différent puisqu’il s’agit de la mutagénèse. Il n’y a pas d’apport de matériel génétique extérieur : ce n’est donc pas de la trangénèse même s’il s’agit encore de Modification Génétique. Cette mutagénèse est aléatoire dans la mesure où c’est tout le génome qui est soumis à l’exposition à la substance mutagène, comme c’est le cas aussi avec la mutagénèse utilisant les radiations ionisantes. La réussite de la mutation est vérifiée à la fois par la fonctionnalité de résistance à l’herbicide et par le séquençage génétique du gène cible qui est un gène bien identifié (ALS1). Par contre, en raison du caractère aléatoire de l’exposition, on ne sait rien ou pas grand chose de l’existence et des effets d’éventuelles autres mutations. De ce point de vue on a la même incertitude que dans les cas des OGM de 1ère génération, pour lesquels on ne sait pas où va se placer le transgène dans le génome.

Remarque : en même temps que Pioneer propose la technologie ExpressSun, BASF propose la technologie Clearfield qui donne au tournesol la même propriété de résistance à un autre herbicide. Cette résistance est issue de mutations qui sont apparues “spontanément” chez des formes sauvages de tournesols adventices. Ces mutations ne sont pas dues à l’exposition à une substance mutagène mais résultent du stress produit par les herbicides destinés à “nettoyer” les cultures.

Le point de vue réglementaire

La directive européenne 2001/18 définit à l’article 2 un OGM comme étant “un organisme, à l’exception des êtres humains, dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle.”
Juste après il y a l’article 3 nommé “exemptions”, dont le 1er alinéa est ainsi rédigé : “La présente directive ne s’applique pas aux organismes obtenus par les techniques de modification génétique énumérées à l’annexe I B”. Cette formulation est sans équivoque : il s’agit bien d’OGM… mais qui ne sont pas concernés par cette directive. En se reportant alors à l’annexe 1B, on peut y lire : “Les techniques/méthodes de modification génétique produisant des organismes à exclure du champ d’application de la présente directive […] sont: 1) la mutagenèse; 2) la fusion cellulaire”.

Cela pose évidemment la question de savoir pourquoi avoir retiré ces techniques de Modification Génétique du champ d’application de la directive censée définir le cadre juridique des OGM, ce qui de fait les transforme en OGM “clandestins”.

La réponse peut être tout simplement trouvée dans les avantages que cette “exemption” procure à ces technologies. N’étant pas légalement considérés comme des OGM, ces OGM clandestins obéissent à la réglementation des végétaux standards et sont donc ainsi dispensés des contraintes de la directive rendant notamment obligatoires des demandes d’autorisation (mentionnant les procédés de production utilisés), des évaluations en terme de santé et d’environnement ainsi que des étiquetages, aussi insuffisants soient-ils.

Ainsi, grâce à ce laxisme évidemment volontaire de la directive, Pioneer peut annoncer qu’il possède 3 variétés ExpressSun prêtes à un développement commercial dès les semis 2009 sans être passé par les contraintes d’autorisation d’OGM. Faute d’homologation de l’herbicide au moment des semis, sans laquelle ces tournesols ne présentent pas d’intérêt, ils n’ont pu être cultivés en 2009. Cette homologation a finalement été obtenue fin mars, ces tournesols pourront être cultivés dès 2010. Dans les pays d’Europe centrale et de l’Est, ces tournesols couvrent 300.000 hectares.

Le point de vue agronomique

D’après leurs promoteurs, ces technologies constituent une “révolution” dans la mesure ou elles permettent de désherber en post-levée, c’est à dire une fois que la plante est levée (avec plusieurs feuilles apparentes). En facilitant ainsi le désherbage par voie chimique, ces tournesols s’inscrivent complètement dans la logique productiviste du modèle agricole dominant. Pourtant, l’utilisation à grande échelle de plantes résistantes aux herbicides depuis plus de 10 ans s’avère catastrophique : les “mauvaises herbes” sont devenues tolérantes à ces herbicides et les doses de pesticides que ces OGM étaient censés diminuer n’ont fait qu’augmenter. En Amérique, là où ces plantes ont été largement utilisées, il devient de plus en plus difficile de contrôler ces “adventices” (voir : OGM : la menace des « super mauvaises herbes » s’amplifie ).

Les promoteurs de ces nouveaux tournesols sont parfaitement au courant de ces problèmes et recommandent des “bonne pratiques” par une utilisation raisonnable de l’herbicide et par des pratiques agricoles telles que la rotation des cultures. Mais même là où ces « bonnes pratiques » sont respectées, les adventices résistantes finissent par apparaître, parfois un peu moins vite, les premières d’entre elles étant les repousses de la première culture résistante qui envahissent les cultures suivantes. En fait, les réelles alternatives au désherbage chimique ne les intéressent pas. Ce qu’ils veulent avant tout c’est vendre leurs semences et l’herbicide qui va avec… le plus longtemps possible ! Si problème il y a ce sera la faute des agriculteurs qui n’auront pas respecté les recommandations. Et au bout de quelques années, les mêmes phénomènes de tolérance des adventices apparaîtront comme ils sont apparus avec les plantes tolérantes au glyphosate. On nous vantera alors un nouveau procédé miracle. Mais d’ici là les terres auront été inondées d’herbicides.

Le point de vue santé environnement

En tout point semblable aux OGM pesticides

Le point de vue militant, citoyen et consommateur

Ces tournesols mutés ne sont qu’une toute petite partie des multiples applications des techniques GM que sont la mutagénèse et la fusion cellulaire. Près de 3000 variétés de 170 espèces différentes obtenues à partir de mutations incitées sont recensées par l’AIEA (Agence internationale de l’énergie atomique). La plupart des variétés de choux et de chicorée, plus de la moitié des colza… sont issus de fusions cellulaires destinées à introduire des stérilités mâles issues d’espèces sexuellement incompatibles et permettant de fabriquer des semences hybrides F1 non reproductibles. Des techniques utilisant des nanoparticules pour introduire des caractères non héréditaires commencent aussi à être développées hors de tout cadre réglementaire. Elles sont commercialisées sans aucun étiquetage et sans aucune évaluation environnementale ou sanitaire.

Les militants doivent traiter ces OGM clandestins pour ce qu’ils sont avec tout le panel d’actions dont ils disposent. Ils doivent sensibiliser le public et interpeller les politiques (notamment les candidats ou élus aux européennes) sur la tromperie que constituent ces OGM clandestins en vue, notamment de la modification de la directive. Le droit des consommateurs doit pouvoir être utilisé en liaison avec les associations de consommateurs pour obtenir ce résultat.


0 commentaire

Laisser un commentaire

Avatar placeholder