« FACE AUX INTIMIDATIONS ISLAMISTES, QUE DOIT FAIRE LE MONDE LIBRE ? »

Tel était le titre, assurément politique, que ROBERT REDEKER donnait à sa tribune du 19 septembre
2006 dans le Figaro. C’est donc principalement sur le terrain politique qu’il convient de lui répondre ;
sans se laisser aveugler par le questionnement concernant la liberté de pensée reconnue à tous.


DE QUOI S’AGISSAIT-IL ?

Un pamphlet sans nuance étalant réellement sa haine de l’Islam et de tous les musulmans, qui a suscité en
réplique des menaces elles aussi bien réelles. Le même pamphlet stigmatisait aussi l’aveuglement et la lâcheté de
tous ceux qui ne partagent pas les mêmes thèses.
Robert REDEKER nous demandait hier de partager ses haines et ceux qui le soutiennent aujourd’hui amplifient
sa démarche en dénonçant l’inconséquence de ceux qui voient dans cette affaire autre chose et plus qu’une
atteinte inqualifiable à la liberté d’expression.

TOUS LES INGREDIENTS SONT REUNIS D’UNE GIGANTESQUE MANIPULATION :

Les conséquences de nos positionnements individuels ou collectifs pourraient aller bien au-delà de la défense
d’un singulier philosophe, associé à la revue «les Temps Modernes » fondée par Jean Paul SARTRE, qui n’est
plus là pour approuver ou désavouer une ligne éditoriale dirigée désormais par Claude LANZMANN et ses
collaborateurs, dont Robert REDEKER est une des plûmes les plus sulfureuses dans le temps troublé que nous
vivons depuis quelques années.

 Nous pouvons déclarer que les menaces dont il est l’objet sont inacceptables, sans oublier de rappeler
qu’elles ont été immédiatement condamnées aussi par toutes les autorités musulmanes de notre pays.

 La vraie question est ailleurs : Est-il possible de le protéger sans le soutenir ? Cette problématique est
implicitement incluse dans la tribune même de Robert REDEKER stigmatisant la démission du «monde
libre » face aux «intimidations islamistes ». Pour lui, le monde est déjà coupé en deux et la guerre est
commencée dans laquelle chacun «doit faire » ce que sa peur devrait lui inspirer.
_Le protéger sans le soutenir ? C’est non seulement possible mais indispensable !

  • La protection c’est le rôle de la force publique.
  • Mais le soutien c’est une interpellation de l’intelligence de chacun d’entre nous.

LE SOUTIEN AFFIRME QUI S’AFFICHE DEJA :

Ce soutien sous des formes diverses implique, que cela nous plaise ou non, de reconnaître le caractère «licite »
de propos qui, appréciés au regard de nos lois et prononcés par une autre bouche, constitueraient un délit
authentique et sanctionnable. Il faut d’abord avoir lu l’écrit du philosophe, que l’on ne peut déjà plus trouver sur
le site internet du Figaro qui l’en a courageusement retiré !
Après lecture s’impose cette évidence : Ce ne sont que des «mots ». Des mots que certains voudraient banaliser
et, sans même porter appréciation sur leur contenu, affirmer que ces «mots » mériteraient le soutien de leur
auteur menacé, au nom de la liberté d’expression…Est-ce si simple ?

NOUS SOMMES DANS L’ETERNEL DEBAT QUI SEMBLAIT CLAIR AU TEMPS DE VOLTAIRE :

Au temps de ce philosophe l’humanisme naissant et la liberté absolue d’expression semblaient constituer les
fondements d’une civilisation fondée sur la raison, privilégiant le débat sur la censure et la rencontre sur la
stigmatisation. Une « foi » humaniste non dépourvue d’utopie considérait que la parole libre saurait mener
l’humanité vers des lendemains plus fraternels.
Mais REDEKER n’est pas CALAS et cette seule référence à la liberté absolue, non seulement de pensée mais
aussi d’expression, posture facile d’intellectuel, nous inviterait clairement à occulter les enseignements de
l’histoire ; ceux de faits anciens ou récents :

  • VOLTAIRE n’ignorait pas que dans les temps anciens le monde avait été ensanglanté par d’authentiques
    appels au Djihad armé et par d’authentiques prêches pour des Croisades sanglantes qui devaient durer
    plusieurs siècles ; il n’ignorait pas non plus que plus proches de son époque l’Europe s’était déchirée de
    guerres de religions, toutes attisées et portées par des «mots » mis au service de l’intolérance ; mais
    VOLTAIRE avait foi en la sagesse possible de l’humanité future.
  • Les faits plus récents du siècle écoulé et de sa tragédie totalitaire ont montré que les «mots » pouvaient
    aboutir à l’extermination de millions d’êtres, pour le seul motif de ce qu’ils étaient. Ce sont les «mots » qui
    ont préparé l’adhésion ou la tolérance envers le pire. Fallait-il défendre, au nom de la liberté d’expression le
    «Bagatelle pour un massacre » de Louis Ferdinand CELINE ? Ou fallait-il rompre avec le «privilège
    d’expression » reconnu à certains intellectuels qui, sans porter les armes eux-mêmes, se réjouissent par
    avance de l’utilisation sanglante de leurs thèses ?

    Le siècle écoulé nous appris que les «mots » tuent aussi sûrement que les armes, mais nous préférons
    oublier que la liberté elle-même peut contribuer au pire.

NOUS SOMMES A LA VEILE D’UN AUTRE BASCULEMENT HISTORIQUE ANNONCE QUI EST
LE THEME MEME DE LA TRIBUNE DE ROBERT REDEKER : « LE CHOC DES
CIVILISATIONS. »


Ce choc est voulu par certains ; dans une frange marginale d’un Islam perverti ; dans une part hélas dominante
d’un occident tout puissant qui a désigné déjà sans nuance «l’axe du mal » qu’il convient d’anéantir dans une
guerre sans merci et sans limite.

Tous ceux qui connaissent les écrits de ROBERT REDEKER savent qu’il se positionne sans ambiguïté dans le
camp de ceux qui veulent légitimer le «choc des civilisations » et toute forme de «guerre préventive ». Pour ce
philosophe, la menace ressentie et la supériorité militaire de l’occident autorisent à faire l’économie d’une
réflexion prospective qui rechercherait un autre dessein pour l’occident qu’un affrontement éternel avec l’Islam.
L’idée même de vivre ensemble et de considérer les injustices faites à certains lui est étrangère ; comme si les
crimes annoncés nécessaires représentaient un projet de civilisation !

La tribune du Figaro n’est pas un texte philosophique, c’est un acte politique et un acte de guerre. Dans
une ancienne tribune proposée au «Monde » il avait qualifié déjà l’Islam de «Régression barbarisante » et cette
outrance simplificatrice lui avait valu de ne pouvoir intégrer comme il le souhaitait le Collège International de
Philosophie. Dans le Figaro du 28 novembre 2005 il transposait dans les banlieues enflammées le siège du
«nihilisme » qu’il convenait de combattre sans merci ; pour lui l’axe du mal traverse nos villes et nous sommes
nombreux a être complices de ce péril islamiste dont la perception semble entretenue par une paranoïa qui
domine sa pensée autrefois féconde.

EN QUOI CELA NOUS CONCERNE T-IL ?

Qu’un philosophe laisse parler sa passion plus que sa raison pose en soi un problème qui le concernerait seul s’il
n’était aussi enseignant de notre école laïque et républicaine.
Mais qu’il tente d’induire après une provocation consciemment assumée, une «solidarité obligée » en signant sa
tribune es-qualité de professeur de philosophie enseignant dans un établissement désigné de la ville de St
ORENS proche de Toulouse, est une implication obligée inqualifiable de ceux là même dont il prétend
désormais attendre un soutien. On comprend la gêne de la FSU et de l’UNSA-éducation, et celle de sa tutelle
ministérielle.

  • En réalité cette attitude est cohérente avec sa tribune dans le FIGARO qui vise autant à stigmatiser l’Islam
    qu’à a dénoncer le laxisme présumé ou l’aveuglement de tous ceux qui refusent de prendre déjà les armes
    pour la croisade a ses yeux souhaitable.
  • Il semble clair que ROBERT REDEKER tente ainsi de nous instrumentaliser tous, dans le seul but de
    donner une crédibilité a ses thèses.
  • Notre liberté qui vaut bien la sienne, est de ne pas y consentir :
    • Dire non à REDEKER ce n’est pas porter atteinte à la liberté d’expression, c’est rappeler qu’il
      n’existe pas de liberté sans responsabilité.
    • Dire non à REDEKER ce n’est pas ignorer le caractère inacceptable des menaces exprimées à son
      encontre, mais revendiquer de pouvoir les dénoncer par une autre voie que le soutien à son
      intolérance.

ROBERT REDEKER EST-IL PROTEGE ?

En moins de 24 heures le philosophe s’est retrouvé «protégé » et «exfiltré » par un ministre de l’intérieur pour
lequel cet événement est aussi une aubaine légitimant son discours sécuritaire.
On doit espérer pour ROBERT REDEKER que cette aubaine ne soit pas utilisée jusqu’à sa logique extrême
faisant du philosophe la victime expiatoire qui accréditerait ses propres thèses.
Il est des «protections » qui pourraient s’avérer plus inquiétantes que sécurisantes, tant leur inefficacité servirait
la thèse de tous les partisans de l’intolérance et de l’islamophobie. Souhaitons une longue vie à ROBERT
REDEKER qui lui permette de rencontrer demain des hommes et des femmes d’Islam qui lui feront mesurer la
profondeur de ses erreurs.

LE MALAISE N’EST PAS ETEINT :

Nous sommes nombreux à ressentir l’ambiguïté et le danger d’un positionnement que l’on voudrait
réduire à un choix binaire, nous entraînant dans la perversion même de la pensée de ROBERT
REDEKER.

La Ligue des Droits de l’Homme (LDH) a eu raison de dire à la fois que «L’on ne saurait admettre que
quiconque, fut-ce en raison d’idées nauséabondes, soit l’objet d’intimidations », mais aussi de rajouter «On ne
combat pas les idées de M REDEKER en le transformant en victime ».
L’enjeu est bien de ne pas tomber dans le piège d’un soutien qui serait perçu dans le monde comme le ralliement
de la pensée dominante à sa frange la plus intolérante.

Cette prudence ne semble pas avoir été celle du journal »LE MONDE » dans son éditorial de ce jour 1-2
octobre 2006, intitulé «POUR ROBERT REDEKER » !
Ce même journal qui le 11 septembre 2001
éditorialisait sous le titre «Nous sommes tous américains ! », confondant déjà compassion légitime avec adhésion
anticipée a ce que fut la réplique US, nous invite désormais à être «POUR Robert REDEKER ».

Le «nous » de 2001 n’est plus guère revendiqué depuis qu’il a pu être confirmé que la dangerosité du monde
s’était amplifiée sous l’effet d’une politique basée sur le «choc des civilisations ». Il nous est demandé
maintenant d’être «pour » REDEKER et c’est NON !
Ce titre choisi par le Monde, à peine nuancé dans le contenu de l’éditorial, est sans doute plus qu’une
maladresse. Il semble même incompréhensible après la phrase incluse «Qui croit être lu par les seuls habitués du
Figaro (aujourd’hui du Monde, mais cela a échappé à l’auteur) heurte au même instant des millions de
sensibilités dans le monde ». Quelle démonstration d’inconséquence !

Sommes nous vraiment « POUR » ROBERT REDEKER ?
Si nous hésitions à répondre NON nous donnerions à sa tribune exactement l’impact souhaité par son
auteur, dont les conséquences seraient très considérables.

JACQUES RICHAUD 2 OCTOBRE 2006


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